Dès le lendemain, j’ai bien entendu la personne qui se trouvait derrière le paravent, une dame âgée d’après le son de sa voix, qui disait qu’elle voulait monter dans sa chambre, qu’elle ne voulait pas rester à côté d’un mort ….le mort en l’occurrence …c’était moi ! Car elle n’entendait pas le son de ma voix, et l’anesthésie avait visiblement bousculé un peu sa raison. Dans ma tête je souriais, et je me disais « mais non mamie, je ne suis pas morte, je suis vivante justement, c’est fait , l’opération est derrière moi ! ».
J’ai appris en entendant les infirmières que cette dame avait été opérée en fin de journée, la journée précédant la mienne. Eh bien je vous assure, j’étais stupéfaite de l’entendre parler si vigoureusement, moi qui n’arrivais à émettre que quelques sons discrets. Elle râlait, voulait qu’on l’installe dans sa chambre, elle refusait de rester dans « ce taudis » disait-elle, de plus à côté d’un mort…Quand une infirmière lui a proposé de boire quelque chose , un café ou une tisane, elle a refusé en disant que c’était inadmissible qu’on ne lui serve que cela à manger…Sa fille est venue la voir, et la vieille dame pour cette occasion a été assise dans un fauteuil, donc à peine 2 jours après son opération ! Je ne sais pas ce qu’elle a eu exactement : pontage ? Remplacement ou réparation de valve ? je ne sais pas, mais en tous cas il fallait l’entendre parler avec sa fille, c’était incroyable ! Elle disait aussi qu’elle n’avait absolument pas mal, moi je n’en croyais pas mes oreilles ! On m’avait dit que vu « ma jeunesse » je me remettrai beaucoup plus vite ?!
Mon chéri est venu me voir, je parlais d’une voix chevrotante, je tenais mes mains sur ma poitrine comme pour protéger cette zone de mon corps. Il n’est resté que quelques minutes, je n’arrivais pas à parler correctement et je sentais mes yeux se fermer malgré moi.
Les infirmières ont tenu à me faire une toilette…elles m’ont aidée à me laver les dents, elles ont nettoyé mon corps, du moins les endroits accessibles, elles sont mêmes arrivées à me laver le dos en me faisant mettre sur le côté en me tenant bien le thorax avec mes mains. Quelle aventure, mais cela faisait du bien tout de même, mais j’appréhendais malgré tout ces changements de position, ces manipulations.
J’ai eu la visite du kiné, qui a tenté de me faire respirer à fond, c’était quand même encore difficile. Il m’a donné une sorte de bouteille, dans laquelle il y avait un tuyau, et il fallait que je souffle dans ce tuyau pour faire des bulles, l’objectif étant de rééduquer mon diaphragme, et de faire que mes poumons (qui avaient été légèrement écrasés par l’opération) puissent fonctionner à nouveau comme avant. Le kiné m’a demandé de faire cet exercice plusieurs fois par jour, et m’a dit qu’il reviendrait me voir le lendemain.
J’avais donc un pansement large sur le sternum jusque sous la poitrine, et un » gros » pansement sous lequel je sentais un paquet de fils sur le ventre juste sous la poitrine. Un gros pansement à l’aine droite aussi, je ne savais pas ce que c’était, j’ai appris ensuite que c’est par là qu’avait été raccordée la machine qui a remplacé la fonction du cœur pendant un temps, la « circulation extracorporelle ».
Et bien sûr un cathéter au poignet gauche, des fils et des fils …Patienter, il fallait patienter, ne pas paniquer, ne pas s’énerver, mais patienter, je savais que j’étais couchée là pour 3 jours dans cet univers de la 6ème dimension…Tout le personnel était aux petits soins, je n’avais qu’à biper et une infirmière était à mon chevet dans les minutes qui suivaient.
J’en profite pour remercier ici cette formidable équipe, toutes et tous font un travail exceptionnel, j’ai une admiration et une reconnaissance immenses envers cette équipe de « réa » ! On oublie souvent de remercier ces personnes car elles sont automatiquement associées à une période difficile de notre passage à l’hôpital, et pourtant, quel boulot elles font !